Carjo Mouanda - "Le chant des indignés" par Marina Nicolaev

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Carjo Mouanda -

"Le chant des indignés"



La Doxa Éditions, 2015

Éditeur militantISBN 978-2-917576-70-0

France

Préface et Image couverture (gravure) de Marina Nicolaev

La poésie militante c’est un travail noble, dans le vrai sens de terme, qui crayonne les idées et l’avenir de l’homme contemporain engagé directement et inconditionnellement dans la lutte sociale, c’est une forme de la liberté pure dans ce monde injuste et inégal.
Enrôlé sous la flamme des hauts désirs de la liberté, Carjo Mouanda nous augmente par ses poèmes que «L’homme libre est celui qui n’a pas peur d’aller jusqu’au bout de sa pensée.» (Léon Blum). L’aspiration et la liberté ne sont jamais antinomiques dans le royaume de la Poésie. Ainsi la Poésie, c’est le chemin vers la libération et les Poètes sont tous recrutés dans le combat permanent pour l’atteindre.

Dans ce nouveau recueil « Le sang des indignés », Carjo Mouanda nous révèle ses douleurs les plus profondes, en exposant la cartographie de son angoisse existentielle car son « cœur se trouble au regard/Du chagrin des vies poignardées » (Affliction).
Le destin de poète est tatoué perpétuellement par les tragédies «D’un peuple sans terre et sans identité/Abandonné aux sentiments insincères du monde/Qui acclame les bombardements que le dialogue» (L’espoir Interdit).
Son pays sacré africain, la scène tragique des guerres civiles, des conditions de survie dramatiques, cruelles, inhumaines, c’est la « Terre harcelée, / Encens de nos mémoires, /Pieds dans le châtré des cris, / Enlèvent les voiles crues / Qui caressent nos fenils. »(Couleur douloureuse).

Carjo Mouanda confirme le destin de son peuple dans cette « Afrique damnée, ma gaupe/Au cœur d’un pouvoir éhonté/En quête de démocratie humidifiée /Par la flamme d’une paix tarée de nos morts » (Regard peine).
En criant toute sa révolte, Carjo Mouanda garde dans son cœur déchiré l’image effroyable, choquante de cette Afrique en larmes, toute la souffrance du son peuple affaibli, macéré de pauvreté et famine « Les ruelles des larmes de ma mémoire/Couvert du spleen qui orne le vent pur /De nos pochards patriotards de la misère/Sur la terre saugrenue qui se brûle au fiasco. » (Larmoiement).

La guerre ne connaît jamais des gagnants, seulement des innocents qui meurent debout aux yeux grands ouverts, les témoins du Chaos. Dans cet immense ghetto de l’histoire, de cet étrange XXIème siècle des contrastes, nombres de ces déshérites, terrassés par la soif et la faim, sont affectés irréversiblement par la morsure des guerres atroces. « Je me demande bien où vas ce monde/Pourquoi ces enfants de la Syrie effondrée/N’ont pas le droit au sourire et à l’allégresse /Pourquoi les fils et filles de la Palestine/Ne peuvent jouer ensemble avec ceux d’Israël. » (L’horreur).

Ce sont des martyres qui fixent singulièrement tout ce monde immonde, injustifiable. « Pourquoi doit-on discriminer un homme par sa peau /Oubliant que nous avons tous ce même sang rouge/Qui coule dans nos veines avec la même saveur ». (L’horreur).
Le poète se livre du lyrisme tragique à l’idéal de la liberté car « le sang du noir n’est pas noir » il est continûment immortel, symbole du sacrifice suprême: « Sang immortel/De cette chaire mortelle/As-tu perdu la saveur sacrée/Des envies des vies qui vivent ? »(Temps obscurci).

Ses pensées sont imprégnées de la vraie croyance dans un monde africain relié aux valeurs irréfutables de la civilisation, à la beauté impondérable des rêves, à la fierté d’être simultanément, Africain et Poète du son temps. « Courage, poète/Lève-toi/Prends ta plume/Et écris aux tiens/Écris-leur/Et écoute ton cœur/Qui entonne le chant des guerriers. »(Courage poète).
La voix des opprimés, du son pays mutilé, du ce monde massacré au nom de la civilisation, Carjo Mouanda s’assume dans toute sa poésie militante son ineffable Credo: « Je ne crois à rien, sauf à la liberté. J'avoue cette grande faiblesse. » (Emil Cioran).